
Incarcéré depuis 2023 dans le cadre de l’affaire Martinez Zogo, Jean-Pierre Amougou Belinga demeure au cœur d’un tourbillon judiciaire et politique qui divise l’opinion camerounaise. Alors qu’une ordonnance de mise en liberté signée par le juge Sikati avait brièvement laissé espérer un dénouement favorable, son maintien en détention soulève de nombreuses questions. Suspecté à tort selon ses soutiens de viser le fauteuil présidentiel, l’homme d’affaires a pourtant toujours affiché une loyauté sans faille envers le président Paul Biya. Visionnaire économique, patron influent, figure respectée de la diaspora, le Zom'loa des Zoml'oa continue d’alimenter débats, interrogations et mobilisation autour d’une seule revendication : sa libération.
I. Un nom qui dépasse le simple champ médiatique
Jean-Pierre Amougou Belinga n’est pas seulement un patron de presse. Il est devenu au fil des années l’une des figures les plus marquantes de la scène économique camerounaise. Issu d’un parcours atypique, souvent cité comme modèle d’ascension sociale, il a bâti un empire médiatique allant du journal L’Anecdote aux chaînes de télévision Vision 4, Télésud au magazine Africa Express et plusieurs autres du groupe l’Anecdote.
Un empire bâti sur l’ambition, la discipline et l’audace, qui lui a valu le respect d’une partie de la population et de la diaspora, où son nom est synonyme de réussite, leadership et patriotisme économique.
Un homme de pouvoir, mais pas un homme politique
Contrairement aux rumeurs qui ont circulé à certains moments de son ascension, Jean-Pierre Amougou Belinga n’a jamais affiché d’ambition présidentielle. Ses prises de position publiques, tout comme son engagement à travers ses médias, l’ont toujours présenté comme un allié déterminé du président Paul Biya.
Il a financé, soutenu et promu les actions du chef de l’État, ne s’en cachant jamais.
Les accusations de convoitise du pouvoir suprême apparaissent donc, pour beaucoup, comme une construction destinée à justifier le traitement sévère dont il fait aujourd’hui l’objet.
II. L’affaire Martinez Zogo : naissance d’un séisme national
Une disparition qui bouleverse le Cameroun
Lorsque le journaliste Martinez Zogo disparaît le 17 janvier 2023, puis est retrouvé mort cinq jours plus tard dans des conditions atroces, le Cameroun est secoué. La pression médiatique et internationale s’intensifie, et les regards se tournent immédiatement vers les pouvoirs publics, les services de renseignement… et le monde des médias.
La machine judiciaire se met en route
Dans un climat lourd, la justice ouvre un dossier tentaculaire visant plusieurs responsables sécuritaires et personnalités publiques.
Très vite, Jean-Pierre Amougou Belinga est cité, puis arrêté, avant d’être placé en détention provisoire.
Le choc est immense : comment un patron de médias, dont la rivalité professionnelle avec Zogo était connue, mais sans gravité apparente, aurait-il pu commanditer un acte aussi extrême ?
Pour ses proches, ses collaborateurs et la diaspora, l’accusation est non seulement infondée, mais relève d’une machination.
III. L’ordonnance de libération qui fait trembler la justice
Une première signature qui confirme les doutes
Fin 2023, une ordonnance de mise en liberté portant la signature du juge d’instruction Sikati II circule.
Cette ordonnance affirme que la détention de Jean-Pierre Amougou Belinga n’est plus nécessaire pour la manifestation de la vérité.
Pour beaucoup, c’est la preuve que le dossier manque de fondements solides.
Ses avocats jubilent : justice est enfin en train de suivre son cours.
Mais soudain, un revirement spectaculaire
À peine l’ordonnance rendue publique, une seconde signature du même magistrat apparaît… affirmant que la première serait un faux.
Un revirement qui plonge l’opinion dans la stupeur et renforce la conviction d’une partie de la population qu’un bras de fer interne secoue les coulisses de la justice camerounaise.
Comment un juge d’instruction peut-il démentir sa propre signature ?
Pourquoi cette volte-face au moment précis où la libération devenait possible ?
Les critiques parlent d’influence, de pressions, de manipulations. Les défenseurs de l’État parlent, eux, de tentative de falsification du dossier.
Mais une certitude demeure : ce double document a entaché la crédibilité de la procédure.
IV. Des audiences qui s’enchaînent, mais une position qui ne change pas
Malgré les déclarations contradictoires au sein du dossier, malgré la confession d’un co-accusé se déclarant coupable, le tribunal militaire maintient Jean-Pierre Amougou Belinga en détention.
Pour la défense, l’acharnement est évident.
Pour ses partisans, les motivations sont ailleurs :
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volonté de l’écarter durablement du paysage médiatique ?
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tentative de neutraliser un acteur économique trop influent ?
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pression d’acteurs externes redoutant son pouvoir de mobilisation ?
Ce maintien en détention devient pour beaucoup difficilement justifiable au regard de l’évolution du dossier.
V. Pourquoi le tribunal militaire tient-il à le garder derrière les barreaux ?
Une décision qui interroge profondément
L’implication du tribunal militaire dans une affaire impliquant un civil alimente les débats.
Plusieurs analystes estiment que cette juridiction, par sa structure hiérarchique, est davantage sensible à l’exécutif que les tribunaux civils.
D’où une question centrale :
la détention d’Amougou Belinga est-elle vraiment une conséquence juridique, ou une décision d’équilibre politique ?
Pour ses soutiens, les motivations réelles seraient :
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limiter son influence politique et économique,
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le neutraliser dans une période de transition sensible au Cameroun,
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ou encore empêcher l’émergence d’un pôle médiatique trop indépendant.
VI. La diaspora camerounaise : un soutien massif et inébranlable
Dans les capitales européennes, la diaspora camerounaise s’exprime d’une seule voix :
Jean-Pierre Amougou Belinga doit être libéré.
Pour beaucoup d’entre eux, il est :
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un entrepreneur visionnaire,
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un employeur de milliers de jeunes,
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un mécène et bâtisseur,
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un symbole d’ascension sociale et de patriotisme économique.
Il bénéficie d’un véritable capital sympathie, fruit de ses investissements, de ses actions sociales et de sa générosité.
Son surnom — « le Zom'loa des Zom'loa » — reflète cet attachement affectif, mêlant respect, admiration et reconnaissance.
Pour ces communautés expatriées, son emprisonnement est vécu comme un affront, une injustice, voire une tentative d’étouffer les élites économiques nationales.
VII. Un homme utile au Cameroun, pas derrière les barreaux
Qu’on l’aime ou qu’on le critique, un fait demeure :
Jean-Pierre Amougou Belinga a créé des emplois, formé des professionnels, soutenu l’éducation et participé à la modernisation du paysage audiovisuel camerounais.
Pour la jeunesse qu’il emploie, il n’est pas seulement un patron :
il est un modèle.
L’empêcher de travailler, c’est priver le Cameroun d’un acteur économique de poids, dans un pays où l’emploi, la formation et l’entrepreneuriat sont des enjeux cruciaux.
VIII. Au-delà du cas Amougou Belinga : un miroir tendu à la justice camerounaise
Un procès qui dépasse la personne et englobe tout un système
L’affaire Belinga est devenue un symbole :
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symbole des tensions internes,
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symbole du rapport entre justice et exécutif,
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symbole du poids de l’opinion publique,
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symbole du rôle de la diaspora dans les débats nationaux.
La façon dont ce dossier sera bouclé déterminera, pour beaucoup, la perception de la justice camerounaise dans les prochaines années.
Un dossier qui appelle vérité, courage et transparence
L’affaire Jean-Pierre Amougou Belinga n’est pas seulement judiciaire. Elle est politique, sociale, économique, symbolique.
Elle met à nu des fragilités, des tensions et des contradictions dans un système où les frontières entre pouvoir, justice et influence sont parfois floues.
Pour ses partisans, il est innocent.
Pour ses accusateurs, il est un acteur clé du dossier Zogo.
Pour sa diaspora, il est un pilier, un repère, un bâtisseur.
Ce qui est certain, c’est que le Cameroun joue une partie de son image dans la manière dont ce dossier sera traité jusqu’au bout.
Et que la question restera brûlante tant que justice, transparence et vérité ne seront pas pleinement établies.
Guy EKWALLA







